Rose de Paris. Dans le tourbillon des années folles





Gilles Schlesser nous a habitué à de nombreux livres pimentés par des énigmes policières sur les lieux de légende de Saint Germain des Près ou dans le milieu surréaliste des années folles de Montparnasse dans « La mort n'a pas d'amis ». Il revient cette fois avec le dessinateur Eric Puech et une bande dessinée pour les aventures héroïques d'une bécassine et de son julot pendant l'âge d'or de Montparnasse. Elle est demoiselle du téléphone, une toute nouvelle invention dévoreuse d'employées dans les centraux d'accrochage d’appels. Lui est chauffeur, un peu marlou, mais si séduisant pour une bretonne qui débarque à l'ancienne gare dans les années 20.

Rose de Paris. Dans le tourbillon des années folles

Dans l’effervescence du boulevard et du carrefour Vavin, elle croise les nuits chaudes de Montparnasse au Jockey, au bal nègre de la rue Blomet ou dans la Rotonde du père Libion. Les animateurs ont pour nom Tzara et son monocle, Kisling avec sa coupe au bol, Foujita et son chat, la belle Kiki de Man Ray ou l'extravagant Fitzgerald. Le connaisseur aimera les clins d’œil aux anecdotes fameuses des montparnos, nombreuses au fil des pages, comme ce match de boxe improvisé entre Hemingway et Callaghan au bar Falstaff. Le bœuf sur le toit, la closerie des lilas, l'expo de 1925 : rien ne manque au décor des aventures de nos deux tourtereaux, pas même l'ambiance délétère du trafic de coco, des drames et des suicides, nombreux hélas. Derrière le jazz, le sexe, les bulles de champagne et les cocktails américains, le désespoir fermait la marche, collant ceux qui avaient la poisse aux basques et ne purent faire leur place au soleil de leur vivant. N'est pas Prévert ou Picasso qui veut.

Rose de Paris. Dans le tourbillon des années folles

Les deux auteurs restituent cette saveur pleine d'émotion, tonique et inquiétante d'une période insensée où le pire côtoyait le meilleur, mais qui laissa une marque incroyable dans l'histoire de l'Art associée à la vie parisienne. Beaucoup d'acteurs étaient des génies, d’autres beaucoup moins et l'assoupissement de cette période faste montra combien le mythe avait définitivement pris le dessus ; il continue encore aujourd'hui de nous émouvoir avec cette fameuse « génération perdue » ou dans la rue Delambre de Patrick Modiano. Cette bande dessinée lui donne cette touche affective qui le fait durer et l’énigme policière lui rend sa vitalité comme une belle réussite qui se souvient que Simenon fréquentait aussi le Montparnasse des années folles.

D.L

Note : le 05/03/2015 : Dédicace d'Eric Puech à la librairie Bulles en tête (17e)

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