Le corpus débute par une photo d’un balcon au-dessus de l’hôtel de Lamoignon, rue Pavée, par Séeberger. Aujourd’hui, c’est la bibliothèque historique de la ville de Paris. Gabrielle Chanel fut la première à confier aux photographes, justement aux frères Séeberger, le soin d’illustrer ses modèles en extérieur au lieu du traditionnel salon, mais c’est dans les années 50 que s’épanouit la photographie de mode inspirée par le décor parisien. De nouvelles marques prennent la place de nombreuses maisons qui disparurent, faute de clientes, sous l’occupation et dès 1947, Christian Dior, installé au 30, avenue Montaigne impose un style qui marque durablement son temps, taille cintrée, épaule arrondie et jupe corolle dont certaines nécessitent 40 mètres de tissu. En dépit de cette révolution new look, le tailleur Chanel de 1954 devient la dominante chez beaucoup de femmes actives, dont beaucoup d’actrices, mais laisse la marque de la distinction et du raffinement à la femme-fleur de Dior, comme le prouvent les clichés de légende de ce livre.
Le décor de ce Paris laisse ses symboles sur la pellicule. À l’une, les beaux monuments, signe de faste et majesté, les lieux prestigieux comme l’Opéra, la tour Eiffel, la place de la Concorde, le Louvre, la place Vendôme, symboles d’une opulence imaginaire et d’un plaisir renaissant sur les quais de la Seine. À l’autre, le mouvement d’une ville populaire et agitée, à la terrasse des cafés ou au ventre des Halles, la Parisienne doit pouvoir se montrer à Montmartre, dans les gares, ou sur les boulevards.
Pourtant, la couverture de ce livre honore un tout autre symbole. Celui de lézardes sur des murs comme celui qui constitue en quelque sorte la synthèse d’un passé et préfigure l’avenir de la haute couture : Pierre Cardin. Une femme qui peut se sentir à l’aise au bureau comme dans une soirée mondaine peut également frôler le danger en toute élégance sur une corniche. Mélange d’extravagance et de distinction, il ouvre la voie à toutes les audaces pathétiques qui suivront, dans la décennie suivante, quand disparaîtront de la rue, gants, chapeaux et talons aiguilles. Photographiée par William Klein en 1961 au-dessus d’une boulangerie rue Saint-Jacques, Dorothy Mac Gowan, les porte pour quelque temps encore, …
Malgré l’absence de commentaires, ou d’interviews, c’est dommage, il y a beaucoup à dire de cette évolution, ce livre qui couvre la mode du vingtième siècle ravira beaucoup d’amoureux du photostyle de renom comme Robert Capa ou Frank Horvat et les fans de l’esthétique vintage.